Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 1, 1931.djvu/159

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comme imposés à la matière par un tyran étranger qui les lui communique par des actes. La nature, dans son travail, ne distingue pas les détails de l’ensemble ; mais pousse à la fois de toutes parts, s’enchaînant à elle-même, sans essais, sans retours, sans modèles, sans visée particulière, sans réserves ; elle ne divise pas un projet de son exécution ; elle ne va jamais directement et sans égard aux obstacles ; mais elle se compose avec eux, les mélange à son mouvement, les tourne ou les emploie ; comme si le chemin qu’elle prend, la chose qui emprunte ce chemin, le temps dépensé à le parcourir, les difficultés même qu’il oppose, étaient d’une même substance. Si un homme agite son bras, on distingue ce bras de son geste, et l’on conçoit entre le geste et le bras une relation purement possible. Mais, du côté de la nature, ce geste du bras et le bras même ne se peuvent séparer…

Phèdre

Le construire serait donc de créer par principes séparés ?

Socrate

Oui, le fait de l’homme est de créer en deux