Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 1, 1931.djvu/192

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à l’âme, et que le Temps lui-même doive trouver si durs et si difficiles à digérer, qu’il ne puisse les réduire qu’à coups de siècles ; et encore, les ayant revêtus d’une seconde beauté : une dorure douce sur eux, une majesté sacrée sur eux, et un charme de comparaisons naissantes et de secrète tendresse tout autour d’eux, institué par la durée… Mais tu ne sauras plus rien. Tu ne peux concevoir que l’ancien Socrate, et ton ombre routinière…

Phèdre

Fidèle, Socrate, fidèle.

Socrate

Alors, il faut me suivre ; et si je change, changer !

Phèdre

Mais vas-tu donc dans l’éternité révoquer toutes ces paroles qui te firent immortel ?

Socrate

Là-bas, immortel, — relativement aux mortels !… — Mais ici… Mais il n’y a pas d’ici, et tout ce que nous venons de dire est aussi bien un jeu naturel