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Page:Valéry - Œuvres de Paul Valery, Vol 7, 1937.djvu/114

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Ceci a fait merveille pour la fortune posthume de Stendhal. Il rend son lecteur fier de l’être.

Beyle ne peut se tenir d’animer directement ses ouvrages. Il brûle d’être soi-même en scène, d’y rentrer à tout coup ; il prodigue la fausse confidence, les apartés, le monologue. Il agite en personne ses fantoches, dont il se compose une troupe sociale fort complète, où les emplois sont définis comme dans l’ancien théâtre. Il se fait des amants, des barbons, des prélats, des diplomates, des savants, des républicains, des militaires de l’ex-Garde. Ces types sont plus convenus que ceux de Balzac ; et, donc, plus dessinés. Il en voit les idées plus que la pensée, les sentiments plus que les ressorts et que la fonction dans le monde. Pour lui, Napoléon, (par exemple), est un héros ; il est un modèle d’énergie, d’imagination, de volonté, une grande âme pourvue d’un intellect prodigieusement net, un amant de la grandeur idéale, qui aime la puissance et la gloire d’une amour passionnée à la Stendhal. Mais Balzac voit l’organisateur et l’Empire, le Code Civil, la Révolution accomplie, consolidée, maîtrisée, la Société rétablie, la légende sortir de l’histoire, et, par la vertu populaire du mythe, envahir le domaine politique.

Beyle aperçoit de Napoléon ses traits antiques, son aspect italien, ses caractères si fortement marqués où il retrouve Rome et Florence, le César et le Condottiere. Balzac considère surtout l’Empereur des Français.

On voit que le parallèle de Balzac et de Stendhal, si l’on prenait quelque intérêt à cet exercice, pourrait se concevoir et