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LES FONCTIONNAIRES CIVILS

sition n’entraîne aucun déshonneur pour le parjure dans cette société corrompue ; soutenir un mensonge de son serment en plein tribunal est un service mutuel que l’on se rend à charge de revanche entre parents, entre amis, un acte de déférence qu’un maître exige de son serviteur, sans que suborneurs ou subornés attachent la moindre idée de honte à ces transactions coupables.

Un petit fait très-authentique donnera une idée assez exacte des habitudes de mensonge de la race indienne et de la difficile position du juge. 11 y a quelques années, un riche fermier du doab du Gange fut accusé d’avoir tué un Indien dans une rixe : vingt-cinq témoins vinrent affirmer en plein tribunal qu’ils avaient vu l’accusé porter le coup mortel ; trente autres établirent un alibi, en attestant sous serment qu’ils l’avaient vu à un village éloigné de vingt-cinq milles à l’instant où le meurtre fut commis. Il n’y a là jusqu’ici qu’un fait qui se reproduit chaque jour dans les tribunaux de l’Inde ; mais le plus piquant de l’affaire, c’est que des deux parts il y avait parjure et mensonge. Le fermier n’avait pas commis le meurtre, il ne se trouvait pas, lors de sa perpétration, dans un autre village, mais était, comme il fut prouvé d’une manière irrécusable, dans sa cabane, à quelques pas du théâtre du crime.

Les fraudes ne sont pas au reste moins usitées dans les affaires civiles, et malheureusement, il faut le dire, la moralité des Européens qui résident dans l’Inde ne résiste pas toujours à l’influence corruptrice du mi-