Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/130

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qui commande, alors que l’on est si près de moi !

Mais quand je serai devant l’ennemi ; dans une salle immense et bondée ?…


Salle du Génie.

J’y suis — la salle est bondée et immense ! elle me paraît telle du moins. Ce sont les adversaires qui ont préparé la rencontre. Moi, je n’ai eu que le loisir de ne rien préparer, rien ! pas la frimousse d’un exorde, pas la queue d’une péroraison !

Les ardents de mon comité m’ont tiré à hue et à dia pour aller, dans les communes, à la chasse aux influents. J’ai couru ici, là, ailleurs encore, j’ai fait le tour de la circonscription à pied, en wagon, en charrette — malade des canons pris sur le zinc pour trinquer avec les braves gens.

Je me contentais d’humecter mes lèvres, mais je n’en avais pas moins la nausée du vin, et je passais pour bien froid ou bien fier auprès de ceux qui me voyaient accepter en rechignant la tournée qu’ils offraient de si bon cœur.


Disséminés et rares, les frères à qui l’on rendait visite et qu’on avait à aller chercher tout au bout d’un champ, ou à faire demander à l’atelier — dont on mangeait le temps, que l’on compromettait, même, auprès des patrons, et sur le compte desquels on s’était quelquefois trompé.

Ils me toisaient alors, du haut en bas, s’indi-