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gardait pas ! Matoussaint nous a assuré maintes fois que l’Histoire nous regardait.


Fin novembre 51.

Mauvaises nouvelles, privées et publiques !

J’ai perdu la leçon de mon Russe… L’actrice des Délassements est partie au diable, il l’a suivie.

Je reste avec mes quarante francs par mois et des habits râpés. C’est dur !

En politique, le ciel est noir.

La République sera assassinée un de ces matins au saut du lit. Les symptômes sont menaçants, la patrie est en danger. Nous n’avons peut-être pas été si fous et tellement gamins de nous constituer en Comité, quoique j’en aie rougi de temps en temps tout seul, et mes camarades aussi, je crois bien.

Mais cependant, cependant ! ne vaut-il pas mieux que nous ayons joué au soldat, même au tribun, et que nous soyons là, ne fût-ce que nous cinq, pour sauter dans la rue et appeler aux armes, si Napoléon fait le coup !

Nous pouvons entraîner, réunir dix, vingt, trente étudiants.

Auprès des jeunes gens, ces mots de « Comité » font bien ; ils croient être dans un cadre d’armée, suivre un mot d’ordre venant de chefs élus. Je sens bien que je marcherais, moi, plus confiant, devant un groupe d’hommes qui se seraient triés, qui auraient la glo-