Page:Vallès - Le Bachelier.djvu/447

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ongles et des dents et d’appeler au secours, quand le père imbécile voudra les prendre pour les mener là où l’on fait ses humanités.


Je n’étais vraiment pas mal taillé, moi.

Peux-tu me dire ce que je vais devenir demain ?

Ce sera pour moi comme pour les autres l’hôpital, la Morgue, Charenton — je suis moins lâche que quelques-uns et je suis bien capable d’aller au bagne.

Un soir de douleur et de colère, je suis homme à arrêter dans la rue un soldat ou un mouchard que je ferai saigner, pour pouvoir cracher mon mépris au nez de la société en pleine Cour d’assises.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

« Jacques. »

C’est ma mère qui m’appelle.

Elle me fait asseoir à ses côtés.

« Écoute : le proviseur s’est approché de moi au cimetière, pendant que tu regardais les arbres et que tu arrachais la tête à des fleurs… tu ne te rappelles pas ?… tu avais l’air d’un fou ! »


Je me rappelle. Pendant que la terre tombait sur le cercueil, je songeais à la vie des champs, lâchée pour le bagne universitaire !


Ma mère m’a dit ce qu’elle voulait me dire.

J’ai poussé un cri et j’ai eu un geste qui l’a atteinte et même meurtrie.

Elle a éclaté en sanglots. Je me suis jeté à ses ge-