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LES IRRÉGULIERS DE PARIS.

Là il s’assit et se découvrit. En même temps, il prit une cuiller dans sa poche, et de son chapeau retira une boîte de fer-blanc qui avait dû contenir des sardines, mais qui contenait ce jour-là, sans doute, du riz au lait.

Il découvrit la boîte, la relogea dans son chapeau et se mit à manger tranquillement. Il racla enfin le fer-blanc, et remit son buffet sur sa tête.

Il se leva et partit.

Je ne l’aurais pas lâché pour un empire, et je me mis à marcher sur ses talons. Il entra dans un hôtel du quartier latin, rue des Mathurins-Saint-Jacques. J’avais eu des amis dans la maison. C’était le même propriétaire ; il me connaissait.

Je l’interrogeai à propos de mon homme ; il me répondit en deux mots :

Il s’appelait Chaque ; il était ancien Pallicare, actuellement orientaliste.

On ne voulut ou on ne put m’en dire davantage, et je restai rêveur en face de ces renseignements mystérieux : me demandant si c’était la coutume, dans le vieil Orient, de porter sa cuisine dans son chapeau : me demandant aussi ce que pouvait être la profession de Pallicare en retraite et d’orientaliste en garni.

Je n’eus ni trêve ni repos que je n’eusse soulevé ces voiles, et il me fut donné enfin de me retrouver avec le sphinx à la boîte.

Il avait, ce jour-là, son chapeau vide, mais ses poches horriblement pleines, et il en tira successi-