« A boyre, a boyre, » voilà le cri qui retentit dès les premières pages du Roman. Gargantua le pousse en venant au monde ; il tient tout ce qu’il promet : c’est un grand buveur[1]. Pour quiconque a l’habitude d’interpréter un mythe, ce cri signifie ici : « De l’instruction, de l’instruction. » Gargantua en effet s’instruit avec avidité. Le fils tient du père : il a le gosier desséché ; aussi dès le berceau hume-t-il le lait de quatre mille six cents vaches ; c’est un insatiable buveur[2] : il s’instruit autant et même plus que son père. « Trinch[3] » est le mot de la mystérieuse bouteille. « Buvez » c’est-à-dire abreuvez-vous de science ; soyez-en aussi altérés que Gargantua et Pantagruel ; vous vous affranchirez du pire esclavage, l’ignorance compagne du vice qu’exploitent les tyrans. En devenant plus savants vous deviendrez meilleurs ; car la connaissance de la vérité et la vertu sont identiques : de là dépend le bonheur de chacun et de tous ; c’est l’ivresse, la joie immense promise au