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LES
POÈTES DU TERROIR


ALSACE

HAUTE ET BASSE ALSACE [TERRITOIRE DE BELFORT]


Bien près de quarante années se sont écoulées depuis les événements qui firent de nos plus pittoresques provinces de l’Est une terre d’Empire. C’est à peine si l’on put sauver le territoire de Belfort. Sur ce sol qui s’était donné librement à la France après le traité de Westphalie, en 1648, l’école allemande n’enseigne plus, dit-on, le français aux jeunes Alsaciens. « Dans l’enseignement secondaire, des professeurs venus le plus souvent d’outre-Rhin présentent comme étrangère la langue qui pendant plus de deux cents ans fut officielle dans le pays. Ils en montrent la grammaire, mais ils en ignorent la prononciation. À vrai dire, depuis peu de temps, un décret autorise les instituteurs primaires à donner, en dehors des heures de classe, à un nombre restreint d’élèves, des leçons particulières de français. Mais l’école normale où furent formés ces instituteurs a négligé de les familiariser avec la langue française, de sorte que, la connaissant à peine, ils l’enseignent mal[1]. »

Pourtant le français, prohibé de l’instruction, ne l’est point complètement de la vie publique. Malgré les vexations d’une police jalouse de ses prérogatives, et partant tracassière à l’excès, le petit peuple ne se laisse point entamer : il sait garder son individualité, mélange harmonieux de la culture latine et du caractère allemand, et, instinctivement, s’attache aux traditions

  1. Henri Albert, La Langue et la Littérature française en Alsace.