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LES POÈTES DU TERROIR

ROGER DE COLLERYE

(xvie siècle)

Il était de Paris, bien qu’en réalité il ait passé la plus grande partie de sa vie à Auxerre, où il fut secrétaire de Monseigneur Jean Baillet et de Monseigneur François Ier de Dinteville, successivement évèques bourguignons.

À l’en croire, son passé s’accordait mal avec le caractère édifiant de son emploi. Ses désordres lui valurent d’être incarné dans ce type de Roger Boutemps qui, en Bourgogne, est devenu le symbole de la belle humeur, et même de la débauche, chez les vignerons. « Tous les suppôts de l’abbé des fous d’Auxerre, a-t-on écrit[1], tous les Bazochiens, Clercs du Châtelet, Enfants sans souci, Sots attendants, toute cette grande famille de philosophes sans chaussures et de gais meurt-de-faim, tous ces mignons festus et goguelus, acolytes de la Mère-Folle, tous étaient ses camarades, et tous ces fous, archifous, fanatiques hétéroclytes, inventés, poètes de nature, etc., autres légitimes enfants du vénérable père Bon-Temps, tous reconnurent leur idole dans la jovialité, la pauvreté sans tristesse de Roger de Collerye. Ils ajoutèrent à leur fiction traditionnelle son nom de baptême, Roger, et il est ainsi devenu Roger Bontemps, le Roger Bontemps des chansons. »

Deux faits dominent son existence troublée. Collerye, à une époque qu’on ne saurait préciser, entra dans les ordres : à la mort de Monseigneur François de Dinteville, ayant perdu son emploi, il vint à Paris et se mêla à cette bohème littéraire qui fréquentait le quartier de l’université et volontiers prenait la montagne Sainte-Geneviève pour le mont Parnasse. Ce clerc tonsuré — du moins le présume-t-on ainsi — eut des amours de choix qui lui valurent plus de désillusions qu’il ne les avait parées d’espoir. Pauvre plus que jamais, trahi, déçu par son rêve, il revint en Bourgogne juste à temps pour transcrire ses derniers rondeaux et préparer une édition de ses œuvres qui lui tint lieu de consolation dans la vieillesse. » Il mourut peu après l’année 1536, laissant un unique recueil de vers publié à Paris par Roffet (in-8o : Les Œuvres de maistre Roger de Col-

  1. Charles d’Héricault, Préface aux œuvres de R. de Collerye.