Page:Van Bever - Les Poètes du terroir, t1, Delagrave.djvu/329

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
307
BOURGOGNE

Maintenant refleurit la reine-marguerite,
Dernier sourire de l’été.

Les cerisiers dorés perdent leur beau feuillage ;
Les branches des pommiers courbent sous les fruits mûrs ;
Le raisin blond suspend ses grappes au treillage,
Et la figue brunit à l’angle des vieux murs.

Contre les espaliers la pêche savoureuse
Etale en rougissant son duvet velouté.
La courge traîne au loin sa tige vigoureuse
Sous le « soleil » jaune et voûté.

La capucine en fleur dans ses feuilles conserve
Des gouttelettes d’eau, diamants tout tremblants ;
Et le saule penché sur le bord d’une serve[1]
Cache son tronc gercé sous les liserons blancs.

Le long de nos buissons où l’on voit quelques nèfles,
L’écolier tend un piège au bec-figue engraissé ;
Les chasseurs aguerris poursuivent dans les trèfles
Quelque pauvre lièvre blessé.

Les bergers, abrités de la bise qui gronde,
Font au bord des fossés des fouets retentissants ;
Et la bergère, en train de danser une ronde,
Laisse aller aux taillis ses troupeaux mugissants.

Le matin, le brouillard s’allonge sur la terre,
Et voile la montagne et la plaine à nos yeux ;
Sur le haut des noyers le pinson solitaire
Jette un cri sonore et joyeux.

Mais si le soleil fond le givre des ramures,
On voit des fils d’argent se promener dans l’air ;
Les insectes dans l’herbe ont encor des murmures ;
L’alouette en chantant monte dans le ciel clair.



À la pointe du jour s’éveille le village :
Les vendangeurs s’en vont à la vigne en huchant[2] ;
Ce sont partout des bruits de chars et d’attelage,
Et de bœufs à pas lourds marchant.

  1. Réservoir.
  2. En poussant des cris de joie.