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BRETAGNE

HIPPOLYTE DE LA MORVONNAIS

(1802-1853)


L’ami de Maurice de Guérin, le lakiste des mers, ou plus justement, selon l’expression de Sainte-Beuve, « le peintre des landes », Hippolyte-Michel de la Morvonnais, naquit à Saint-Malo le 11 mars 1802. Il appartenait à une vieille famille bretonne ; son père, jurisconsulte, avait été député à l’Assemblée législative. Lié intimement avec Lamennais, son compatriote malouin, il épousa par amour, on 1826, Mlle Marie Macé de la Villéon, parente de ce dernier. Disciple des poêtes « lakistes » et en particulier de Wordsworth, il vécut au manoir du Val-en-Pleudihen, sur les bords de l’Arguenon (Côtes-du-Nord), et là écrivit de charmantes poésies, qu’il fit paraître quelques années après sous ce titre : La Thébaïde des grèves, reflets de Bretagne (Paris, Gabriel Roux, 1838, in-32). Auparavant, il avait donné un drame lyrique, Sapho, et quelques élégies à la manière des Latins.

Trop ellacé et timide pour aspirer à la gloire, il se laissa vite oublier. Pourtant il eût mérité une place au premier rang parmi les évocateurs de sa province. Nul mieux que lui n’a dépeint la grisaille des paysages celtiques et noté la vie primitive des êtres et des choses de la côte bretonne.

Aussi bien ne pourrait-on passer quelques heures aux lieux où il vécut entre une femme aimée et quelques amis d’élite, où il dort maintenant, sous un menhir surmonté d’une croix, sans ressentir toute l’émotion dont il a fécondé ses strophes lyriques. Voici l’aocienne abbaye de Saint-Jacut, « l’île des Ebihens qui porte sur sa crête une tour de granit droite sur son écueil », et la petite ferme avec ses figuiers, cachée dans un pli de l’îlot « comme un oiseau de mer qui fuit les coups de vent… »

On l’a dit, la mort de Mme de la Morvonnais, le 21 janvier 1835 rompit le bel équilibre de cette existence et endeuilla la lyre du poète. Il quitta le Val avec sa fille unique et n’y revint que plusieurs années après. Pour occuper les heures de solitude, il exhala sa douleur et chanta son bonheur perdu. La publication de La Thébaïde des grèves date de cette époque ; elle fut suivie de deux autres recueils de poésies : Un Vieux Paysan (Paris, W. Coquebert, 1840, in-12) et les Larmes de Magdeleine (ibid.,