O maison du Moustoir ! combien de fois la nuit.
Ou lorsque sur le port j’erre parmi le bruit,
Tu m’apparaîs ! Je vois les toits de ton village
Baignés à l’horizon en des mers de feuillage,
Une grêle fumée au dessus, dans un cbamp,
Une femme de loin appelant son enfant,
Ou bien un jeune pâtre, assis près de sa vache,
Qui, tandis qu’indolente elle paît à l’attache.
Entonne un air breton, un air breton si doux.
Qu’en le chantant ma voix vous ferait pleurer tous.
Oh ! les bruits, les odeurs, les murs gris des chaumières.
Le petit sentier blanc et bordé de bruyères.
Tout renaît comme au temps où, pieds nus, sur le soir.
J’escaladais la porte et courais au Moustoir ;
Et dans ces souvenirs où je me sens revivre.
Mon pauvre cœur troublé se délecte et s’enivre !
Aussi, sans me lasser, tous les jours je revois
Le haut des toits de chaume et le bouquet de bois.
Au vieux puits la servante allant emplir ses cruches,
Et le courtil en fleurs où bourdonnent les ruches,
Et l’aire, et le lavoir, et la grange ; en un coin,
Les pommes par monceaux ; et les meules de foin,
Les grands bœufs étendus aux portes de la crèche,
Et devant la maison un lit de paille fraîche.
Et j’entre, et c’est d’abord un silence profond,
Une nuit calme et noire ; aux poutres du plafond
Un rayon de soleil, seul, darde sa lumière,
Et tout autour de lui fait danser la poussière.
Chaque objet cependant s’éclaircit : à deux pas,
Je vois le lit de chêne et son coffre, et plus bas
(Vers la porte, en tournant), sur le bahut énorme,
Pêle-mêle, bassins, vases de toute forme,
Pain de seigle, laitage, écuelles de noyer ;
Enfin, plus bas encor, sur le bord du foyer,
Assise à son rouet près du grillon qui crie,
Et dans l’ombre filant, je reconnais Marie