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LES POÈTES DU TERROIR

Et qu’on boit à même la tonne
Sur la table du cabaret.

De tous côtés sont des collines.
La ville est dans un entonnoir.
Un grand fleuve sert de miroir
À de vieilles tours en ruines.

Ce château, du temps des barons,
Etait la clef de la Bretagne.
Aujourd’hui les Sœurs de Chavagne
Y font leurs saints heptamérons.

Ancenis n’a plus de couronne,
Les seigneurs sont morts, Dieu merci !
Car elle est plus heureuse ainsi,
Que du temps qu’elle était baronne,

La Loire a cessé d’investir
Ses tours, où poussent les orties,
Depuis qu’on les a converties —
Comment dirai-je ? — en repentir !

Elle vient quand même à la rive
Échouer amoureusement,
Et coule si nonchalamment
Que son onde parait captive.

Mais, les bords anceniens franchis,
Elle emporte en mer avec elle
La silhouette et la dentelle
Des objets qu’elle a réfléchis !

J’ai parlé de tout, sauf des femmes :
Elles auront mon dernier mot !
Je crois vous avoir dit plus haut
Qu’elles étaient d’honnêtes âmes.

Chez elles la fleur de vertu
S’épanouit en pleine terre ;
Le cœur large, du caractère,
Mais la langue ! un couteau pointu

Il faut les entendre à leur porte
S’entretenir en comité :
« Et votre homme ? — Il est alité.
— Et votre voisine ? — Elle est morte