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LES POÈTES DU TERROIR

LUD JAN

(1864-1894)


« En réalité, il se nommait Ludovic-Désiré-Joseph Marie Jan. Il était né, a-t-on écrit[1] le 17 mai 1864, à Ploërmel, dans la partie intérieure et accidentée du Morbihan, à deux pas de la forêt de Brocéliande, au milieu de ces landes de Coetquidan, Sérent, Lanvaux, Ruffiac, vastes espaces incultes et désolés où, il y a vingt ans, on pouvait faire encore jusqu’à cinq et six kilomètres sans trouver une habitation ou une oasis. » Il mourut à Caulnes (Côtes-du-Nord), le 4 octobre 1894, âgé de trente ans. Son œuvre consiste en trois recueils de vers : Dans la bruyère et Les Rêves, publiés par l’éditeur Lemerre (1891 et 1893, 2 vol. in-18 ; Œuvres posthumes, recueillies et présentées au public par ses amis MM. Bertrand Robidou, Lemonnier et Gourdel (Rennes, 1896, in-18). M. Louis Tiercelin, qui fut son ami, a tracé de lui cette image un peu brève, mais touchante : « Nous avons souvent remarqué qu’il ressemblait à certain portrait de Victor Hugo jeune. Le front et le regard étaient graves et calmes : la bouche seule avait parfois des éclairs d’ironie, comme ces lueurs d’orages très lointaines qu’on aperçoit à l’horizon dans un soir calme… » Ses études achevées, il avait quitté sa ville natale pour prendre un modeste emploi de greffier d’une justice de paix au fond d’une bourgade. Il se sentait doublement exilé et des siens et de son rêve. L’ennui l’a miné, précipitant sa fin. Quelqu’un l’a écrit, il y eut chez Lud Jan non seulement un artiste, « doux rêveur obstiné », mais un philosophe que tourmenta sans cesse l’éternel problème de nos origines et de notre « devenir ». Sa poésie est inquiète et mélancolique. « Il a peint, selon l’expression de M. Jules Rousse, avec des couleurs admirables et une ampleur saisissante, le pays où il est né, ces landes immenses du Morbihan, semées de menhirs et de calvaires, des vallées pittoresques où se dressent, au bord des étangs et des cours d’eau, les clochers dentelés de granit et les hautes tours du château de Josselin. »

Sa poésie est un art de prédestiné où vient aboutir le romantisme des vieux maîtres bretons.

  1. J. Rouxel, L’Œuvre de Lud Jan.