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commerciale sera plus effective qu’en 1892 et si la C. K., à défaut d’un monopole de droit que le gouvernement lui conteste, et lui a toujours contesté[1], ne conservera pas une situation de fait qui rendra toute concurrence impossible.

Si nous avons parlé longuement de la C. K., c’est qu’elle est la plus importante et la plus représentative des sociétés commerciales qui n’aient pas reçu, comme l’Abir ou l’Anversoise, le droit de lever l’impôt et, par conséquent, de contraindre les indigènes au travail.

Mais ce serait une erreur de croire que d’autres sociétés du même genre n’aient pas, elles aussi, donné prise à des critiques, et commis, ou laissé commettre de graves abus.

À la fin de 1909, par exemple, les révélations du Dr Doerpinghaus, au sujet des agissements de la Société anonyme belge du Haut Congo (S. A. B.) dans la Busira, vinrent enlever leurs dernières illusions à ceux qui pouvaient croire encore à l’existence, au Congo, d’oasis où le travail du caoutchouc était réellement libre[2]. Il fut établi que, contrairement aux instructions qui leur venaient d’Europe, des agents de la S. A. B., dont les traitements étaient, eux aussi, complétés par des primes, donnaient à croire aux indigènes qu’ils étaient obligés à faire du caoutchouc ou du copal, et se livraient à des violences s’ils se refusaient au travail. Sur la plainte du Dr Doerpinghaus, plusieurs d’entre eux furent, de ce chef, condamné à des peines sévères par le tribunal de Coquilhatville.

En somme, la contagion de l’exemple fut telle que, partout, même dans les zones dites de liberté commerciale, les procédés de contrainte employés par l’État trouvèrent des imitateurs. D’autre part, il n’est pas douteux que, malgré le maintien des

  1. En 1905 et 1906, notamment, des commerçants ont été, avec l’autorisation du gouvernement, acheter de l’ivoire dans le district du Kasaï. Lorsque, plus tard, la C. K. se plaignit de la présence de colporteurs sur son territoire, on lui opposa le silence qu’elle avait gardé antérieurement.
  2. Dr W.-Z. Doerpisghans. Deutschlands Reckte und Pflichten Gegenüber den Belgische Congo, pp. 56 et suiv. Berlin, 1909.