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mois chez le grand chef Lukengu, « roi » des Bakubas, m’écrivait :

La Compagnie du Kasaï a voulu faire produire du caoutchouc par un peuple qui ne voulait se livrer à aucun travail autre que ses occupations traditionnelles. Elle gagna Lukengu, qui enrôla un certain nombre de capitas, pour faire du caoutchouc. Mais les récoltes furent relativement faibles. Le « roi » lui-même nous a dit : Oui, depuis longtemps, la Compagnie du Kasaï nous disait, tout le long du jour : caoutchouc ! caoutchouc ! Nous étions fatigués du caoutchouc. Notre peuple n’a pas le cœur à faire du caoutchouc. Mais, il y a dix lunes, un Bula Matadi est venu, et nous a dit que nous ne devions faire du caoutchouc que si nous le voulions bien. Notre peuple a été très content, et a dit : Merci ! Merci ! Et, maintenant, il ne fait plus de caoutchouc.

Depuis, le docteur Sheppard lui-même, ainsi que le docteur Morrison, m’ont confirmé que la situation avait complètement changé chez les Bakubas et que, dès à présent, la prospérité renaissait dans leurs villages.

Je suis heureux de dire — écrivait M. Morrison, le 28 mars 1910 — qu’il n’y a plus, pour autant que je le sache, de contrainte pour le caoutchouc au pays Bakuba. Nous espérons sincèrement qu’elle ne renaîtra pas sous d’autres formes. On fait courir le bruit que le gouvernement se propose d’imposer une taxe de 24 francs à tous les adultes, hommes ou femmes. Je ne sais si c’est vrai. Comme il n’y a pour ainsi dire pas de monnaie en circulation dans ces parages, je crains fort que ce soit, de nouveau, le caoutchouc obligatoire.

Hâtons-nous d’ajouter qu’il n’est pas question de taxer les indigènes au taux de 24 francs. Un décret récent, dont nous parlerons plus loin, fixe à 12 francs le maximum de l’impôt pour les hommes, avec 2 francs d’impôt supplémentaire par femme, pour les ménages polygames.

D’autre part, conformément aux déclarations faites par le ministre des Colonies, à son retour du Congo, le bassin du Kasaï se trouve compris dans la zone ouverte, depuis le 1er juillet 1910, au commerce libre.

Reste à savoir si l’introduction de ce régime de liberté