Page:Vandervelde - La Belgique et le Congo, le passé, le présent, l’avenir.djvu/112

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Mais s’occuper des cultures, planter des arbres pour l’avenir, avoir un beau poste, bon pour des pékins, cela. On est soldat, c’est pour faire la guerre, n’est-ce pas ? La guerre, ces abominables actes de bandits ! Tout ce que l’esprit militaire moderne a de beau et de grand n’a jamais, ou bien peu, été connu au Congo ; on n’a étalé que les vices du soudard : paillardise, fainéantise, ivrognerie et parfois couardise.

Bien entendu tous les postes du Congo ne ressemblent pas à celui de la Taffari, non plus que tous les guerriers de Bula Matadi ne répondent au signalement qu’en donne le commandant Lenmaire.

En règle générale, même, les stations de l’État — du moins celles que j’ai vues sont bien aménagées, mieux aménagées, parait-il, que dans les colonies voisines ; mais en général, aussi, elles n’ont que de maigres cultures vivrières, ne possèdent guère d’arbres fruitiers, et vivent sur le pays, d’autant plus insupportables aux indigènes qu’elles ont plus de bouches à nourrir.

Est-ce à dire que partout il en soit ainsi ; que partout le voisinage des blancs soit une malédiction pour les noirs, et que tout soit à condamner dans ce qui a été fait, pendant un quart de siècle, au Congo, par l’État Indépendant ou par les Européens établis dans l’État Indépendant ?

Ce n’est pas ce que nous voulons dire.

Le Congo est un monde. Dans ce cinquième de continent, des milliers d’hommes ont exercé leur action : missionnaires, commerçants, planteurs, médecins, officiers, agents d’administration. Les uns étaient excellents, d’autres bons, médiocres, mauvais ou détestables ; les uns étaient possédés du désir d’être utiles à leurs semblables, d’autres, au contraire, étaient venus en Afrique pour se faire une position, ou pour amasser, hâtivement, et par tous les moyens, une fortune.

Comment serait-il possible, dans ces conditions, de porter, sur ces actes complexes, un jugement unique, valable pour toutes les parties d’un territoire immense, qui soit une apologie ou une condamnation ?

Des voyageurs qui n’avaient pas quitté le chemin de fer ou