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d’affaires. Il ajoute au prestige royal, le prestige d’un chef de trust. Pour ceux que ne séduisent pas des décorations ou des titres de noblesse, il a des parts de fondateurs, des actions de jouissance, des places d’administrateurs dans ses sociétés. La presse le soutient. Les ministres se courbent devant lui. La majorité des Chambres n’oppose qu’une faible résistance à ses volontés.

Mais cette résistance s’accentue lorsque s’ouvre l’ère des difficultés. Les abus dénoncés par la Commission d’enquête, les protestations de l’Angleterre, les accroissements démesurés de la dette congolaise, les tentatives faites par le Roi pour créer un pouvoir occulte, au moyen de la Fondation de la Couronne, éveillent des inquiétudes et soulèvent des protestations.

Le Parlement se ressaisit. Il se prononce pour la reprise immédiate. Il vote une loi sur le gouvernement du Congo, dont chaque article est une mesure de défiance contre le pouvoir royal. Il exige que la Fondation de la Couronne disparaisse. Il défend, avec une âpreté croissante, ses prérogatives souveraines.

Malgré tout, cependant, le Roi lutte encore. Impuissant à se mettre au-dessus des lois, il s’efforce de les tourner. De hauts magistrats, de hauts fonctionnaires consentent à l’aider. Le gouvernement ne voit rien, ou ne veut rien voir. Il crée de nouvelles fondations. Il s’épuise en efforts désespérés pour que ses projets ne disparaissent pas avec lui. Il bâtit, il fait des plans, il rêve encore des entreprises nouvelles, lorsque, brusquement, la mort vient le surprendre, dans un coin de son palais démeublé, au milieu des ruines de son système, au moment même où, dans un acte solennel, le ministre des Colonies venait d’annoncer que, pour les indigènes du Congo, l’ère des réformes allait s’ouvrir.