Page:Vandervelde - La Belgique et le Congo, le passé, le présent, l’avenir.djvu/177

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Il va sans dire que nous protestons, par avance, contre cette convention nouvelle, qui ne pourrait d’ailleurs être faite sans l’intervention du Parlement.

L’Abir et la S. A., en effet, ont abandonné « les avantages de leur concession ». Elles n’ont plus d’autres droits que ceux qui dérivent des conventions du 12 septembre 1906. Or, ces conventions obligent l’État à leur remettre tout le caoutchouc qu’il retirera des forêts de leur ancienne concession, sauf à prendre la moitié des bénéfices, mais elles ne disent point que, pour retirer ce caoutchouc, il recourra au travail forcé. Dès l’instant où, comme c’est le cas à présent, il remet aux deux sociétés le caoutchouc que les indigènes fournissent librement, ses obligations sont remplies.

On objecte que, dans ces conditions, les fournitures de caoutchouc sont peu importantes et que, pour ce qui concerne la récolte des produits végétaux, les territoires de l’Abir et de la S. A. sont, à peu de chose près, en jachère. Il faut s’en féliciter. Ce repos, ou plutôt cette faculté de se livrer à d’autres travaux sont indispensables aux populations, après les années terribles quelles viennent de passer ; et les sociétés ci-devant concessionnaires doivent s’en prendre à elles-mêmes si les indigènes, démoralisés par la contrainte, refusent, pour la plupart, de faire du caoutchouc sans y être forcés.

Quant à l’abandon des parts de l’État et à la restitution partielle de leur ancien privilège, que l’Abir et la S. A. demandent à titre de compensation, ou pourra leur répondre, si le Parlement discute jamais cette question, ce que Hill disait à la Chambre des Communes, en 1833, aux planteurs de la Jamaïque :

« Je veux exprimer mes félicitations à l’assemblée de ce que l’esclave ne vient pas ajouter sa part à nos difficultés, en demandant, lui aussi, des compensations. J’avoue ne pas savoir comment nous nous en tirerions si, invoquant la justice, il nous disait : « J’ai été maintenu en esclavage (par l’État) pendant les meilleures années de ma vie ; j’ai été con-