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CHAPITRE II

LA QUESTION DES TERRES ET L’EXPROPRIATION
DES COMMUNAUTÉS INDIGÈNES


Être maitre de la terre, c’est être maître de tous les fruits du travail, sauf de ceux qui permettent au travail d’exister.
Henri George.


§ 1. — Les décrets de 1891-1892.


C’est en 1890 que l’idée d’assurer à l’État le monopole de la récolte de l’ivoire et du caoutchouc fut suggérée au Roi-Souverain, à la fois, par le capitaine Vankerkhoven et le commandant Coquilhat. L’exploitation en régie, par les agents de l’État, de l’ivoire qui valait 20 francs le kilogramme, et du caoutchouc qui en valait alors 7 ou 8, devait rapidement fournir à Léopold II les ressources dont il avait besoin pour faire la guerre arabe et réaliser ses projets d’expansion vers le nord.

Mais la constitution de ces monopoles n’était-elle pas contraire aux stipulations de l’Acte de Berlin ?

On consulta, à ce sujet, plusieurs jurisconsultes. Ils répondirent à des questions captieusement formulées, et en se plaçant à un point de vue exclusivement juridique, que l’État avait le droit d’incorporer à son domaine les terres vacantes et qu’en exploitant ce domaine il ne faisait pas acte de commerçant, mais acte de propriétaire.

Parmi ceux qui, à la demande de Léopold II, rédigèrent ces consultations, se trouvait l’éminent jurisconsulte belge Edmond Picard[1].

  1. Dans son livre En Congolie, M. Picard, tout en maintenant que le