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villages, il demeurait vrai que, « même sur les terres occupées par eux, les indigènes ne pouvaient disposer des produits du sol que dans la mesure où ils en disposaient avant la constitution de l’État[1] », c’est-à-dire, comme le fait remarquer le P. Vermeersch, avant 1885, alors que l’État ne possédait que treize stations, que la plus grande partie du territoire n’était même pas explorée !

Pour le surplus, l’État, ou les Compagnies, soit propriétaires, soit concessionnaires, conservaient sur les terres domaniales, leur droit exclusif sur les produits naturels du sol, spécialement sur le caoutchouc, et, par conséquent, — sauf en ce qui concerne les terres de culture. — rien d’essentiel n’était changé au régime foncier antérieur.

Seulement, on annonçait l’intention d’observer plus sérieusement la loi des quarante heures ; on enlevait aux Compagnies tout droit d’exiger des prestations des indigènes ; on prenait un ensemble de mesures pour empêcher que désormais on ait recours, pour faire rentrer les impôts, à des violences ou des moyens de contrainte illégaux.

D’autre part, au lendemain du rapport de la Commission d’enquête, l’opinion publique, mieux avertie, se montra plus agissante. Les consuls et les missionnaires étrangers dénoncèrent sans relâche les abus qui continuaient à se commettre. La magistrature congolaise, elle-même, montra beaucoup d’énergie dans la répression des délits qui lui étaient signalés. Les agents de l’État, n’étant plus encouragés directement par des primes, et « craignant les substituts plus que les léopards », mirent une mollesse croissante à exercer la contrainte fiscale, si bien qu’en 1908, à l’époque de la reprise par la Belgique, le « système » était en pleine décomposition.

J’eus l’occasion de le constater de visu, lors du voyage que je fis au Congo, pendant les mois d’août, septembre et octobre 1908, au moment même où les Chambres belges venaient de voter le traité d’annexion.

  1. Vermeersch. Les destinées du Congo belge, p. 31.