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Francqui, n’ayant avec lui que trois ou quatre Zanzibaristes, parvint, sans aucune contrainte, à engager sept mille hommes et à en faire marcher, pendant le seul mois de mars, plus de cinq mille. Il faut ajouter à ce chiffre trois mille indigènes recrutés par les factoreries, si bien que plus de huit mille hommes sillonnaient à ce moment, la route de Matadi à Léopoldville. En huit mois, plus de trente mille charges, soit 900.000 kilogrammes, furent ainsi transportés, tandis que, sur l’autre rive du fleuve, plus de six cents indigènes transportaient vers le Pool les lourdes pièces des steamers la Ville-de-Bruxelles et le Roi-des-Belges[1].

Pendant les années qui suivirent, le service des transports devint encore plus intensif : on occupait le Kasaï, on consolidait l’occupation des Falls et de l’Ubangi. On créait la station de Basoko. On devait fournir des porteurs à la Société anonyme belge, qui venait d’établir de nombreux postes sur le haut fleuve, et aux maisons française et hollandaise, dont le mouvement d’affaires allait croissant.

À cette époque encore, les enrôlements étaient libres et l’on s’était borné à établir un plus grand nombre de postes de recrutement.

Mais à partir de 1891 commence le nouveau cours. Le portage devient un impôt, et un impôt d’autant plus insupportable que le besoin des porteurs augmente encore : il faut transporter le matériel des expéditions du Katanga ; envoyer des marchandises vers le Haut, pour payer, si peu que ce soit, les récolteurs de caoutchouc. Bref, le nombre des charges dépasse annuellement cent mille, et pour se procurer, en ne les payant presque pas, les porteurs nécessaires, il faut installer dans chaque poste de recrutement, une cinquantaine de soldats et organiser, dans toute la région, des expéditions militaires pour faire la « presse » des hommes valides.

Pendant toute cette période, et jusqu’au moment ou le che-

  1. Francqui. Historique des transports à dos d’hommes dans le Bas Congo (Le Mouvement géographique, 1889, p. 39.)