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sionnaires protestants, particulièrement, étant toujours à l’affût de ce qui pourrait nuire à l’État, et à la recherche de griefs contre lui[1] ».

L’État, au surplus, ne craignait pas seulement l’œil des missionnaires.

Il avait la même attitude et se résignait à filer doux, provisoirement, lorsque les indigènes étaient eux-mêmes en mesure de se faire respecter.

Nous n’en donnerons pour preuve que cet extrait d’une lettre du secrétaire général Liebrechts, datée de Bruxelles 12 septembre 1904, qui est un exemple remarquable de la cautèle du gouvernement congolais, dans ses rapports avec les chefs qu’il ne se croyait pas capable de réduire :

Les intérêts que nous avons à défendre dans l’Enclave et les régions orientales et septentrionales du bassin de l’Uele, exigent impérieusement que nous évitions de nous créer à la base de l’Uele des difficultés qui gêneraient notre action dans les régions susvisées. Nous devons donc continuer à l’égard des sultans Semio, N’Sasa et Djabir, une politique de temporisation, et chercher par une action habile et prévoyante à nous concilier ces sultans. Ce n’est qu’au moment opportun qu’il faudra saisir une bonne occasion pour faire comprendre plus énergiquement qu’il nous a été permis de le faire jusqu’ici, l’obligation de ces sultans de seconder plus largement les efforts du Gouvernement.

Peut-être, en lisant ces lignes, des gens qui n’ont pas l’esprit colonial, se demanderont-ils d’où procédait cette obligation des sultans de seconder les efforts du gouvernement congolais, et trouveront-ils que cette politique fabienne était totalement dépourvue de la plus élémentaire loyauté.

Tout au moins, a-t-elle eu ce résultat que les populations de l’Uele ont échappé, dans une large mesure, au régime du travail forcé et qu’aujourd’hui encore, leur prospérité relative fait contraste avec la misère et la dépopulation des provinces centrales de la colonie.



  1. Circulaire confidentielle, n° 4469.