Page:Vandervelde - Vive la Commune.djvu/18

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On les trouvait aussi dans le voisinage des pelotons d’exécution et on cite ce dialogue caractéristique entre Calmon et M. Olivier de Watteville, qui voulait poursuivre un individu de ce genre.

— « C’est un de nos agents ! laissez-le libre ! »

— « Mais il a fait fusiller quatorze gardes nationaux réfractaires à la Commune ! »

— « C’était pour mieux cacher son jeu ! »

C’était bien consolant, n’est-ce pas, pour les familles des victimes ? Une autre consolation leur était réservée : l’homme qui faisait ainsi fusiller des innocents, pour mieux cacher son jeu de mouchard, fut décoré de l’ordre de la Légion d’honneur et son nom figure sur le registre, à côté de ceux des soldats et officiers qui ont gagné la croix sur le champ de bataille.

Je ne songe nullement à méconnaître, d’ailleurs, que plusieurs des incendies furent allumés par des partisans de la Commune ; tout le monde connaît le billet signé Ferré, portant l’ordre : « Flambez, finances ».

Mais devant ce sombre événement, il est un sentiment qui devrait être dans tous les cœurs, c’est que l’artisan de ce terrible drame fut avant tout une foule exaspérée, hypnotisée par le souvenir de faits antérieurs. Jules Simon avait écrit pendant le siège, tout en dînant tranquillement, au restaurant, avec Taine : « Luttons jusqu’à la mort et, quand viendra le moment suprême, plutôt Moscou que Paris aux Prussiens, brûlons Paris ! » Qui sait si ce mot n’a pas allumé l’étincelle ?

Brûler Paris ! Quand le patriotisme inspire pareille action, c’est de l’héroïsme, mais quand elle est l’œuvre de la « racaille », défendant la République, ce qui était héroïque et sublime, devient criminel et monstrueux !

Vous êtes des pharisiens, vous qui prétendez être patriotes héroïques, quand vous brûlez votre ville pour ne la point livrer aux ennemis, et ne voyez plus dans cet acte qu’un forfait quand il est accompli par le peuple, aux prises avec les ennemis de la République.

Les armées coloniales n’ont-elles pas fait pire que ne fit la foule de Paris ; n’ont-elles pas, en Chine, pillé, détruit, brûlé, massacré, violé, avec l’autorisation de leurs chefs et l’aveu de leurs gouvernants ?