Page:Variétés Tome I.djvu/247

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part, ces propositions leur eblouissant les yeux, ils promirent de faire merveille, ce qui remit le cœur au ventre de bien des Poincts et de bien des Broderies, qui n’auroient autrement accepté la guerre qu’à ecorche-cul. Combien vit-on après cela de Dentelles qui se faisoient toujours blanches de leurs espées ! Pour s’exciter les unes les autres, elles se racontoient les occasions perilleuses où elles s’estoient rencontrées. Telle Dentelle de Flandre disoit avoir fait deux campagnes sous Monsieur le Prince, en qualité de Cravate ; une autre se vantoit d’avoir appris le mestier sous Monsieur de Turenne ; une autre racontoit comment elle avoit esté blessée au siége de Dunkerque, et que, s’il n’y paroissoit plus, c’estoit qu’elle s’estoit fait penser sur le metier. Il se trouvoit mesme une grande Garniture toute entière de Poinct de Raguse qui disoit avoir appris le mestier sous Monsieur de Candale9, lors qu’il commandoit en Catalogne. Enfin on entendoit raconter partout un nombre infini de belles actions. Il n’y en avoit presque pas une qui ne se fût rencontrée à quelque siége, à la journée d’une bataille, et qui n’eust du


9. Louis-Charles-Gaston Nogaret de Foix, duc de Candale, petit-fils du duc d’Épernon, favori de Henri III, avoit été le roi de la mode pendant la minorité de Louis XIV. Il étoit mort, n’ayant que trente-un ans, le 28 janvier 1658 ; mais les modes auxquelles il avoit donné son nom lui avoient survécu. En 1666, quand parut le Roman bourgeois, on parloit encore des chausses à la Candale. V. notre édition de ce livre de Furetière (Jannet, 1854, in-12, p. 73, note), et les Mélanges d’histoire et de littérature de M. Craufurd, Paris, 1817, in-8, p. 186–187.