Page:Variétés Tome I.djvu/305

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homme, grand seigneur de là auprès, et après lui avoir bandé les yeux, ils le menèrent à travers le bois jusques à leur forteresse11, puis, estant là, ils le desboucherent, luy monstrèrent tout là dedans force munitions, tant de guerre que pour le vivre, avec un molin à bras et un four, des petites pièces de campaigne, à force mousquets et arquebuses, picques, grenades, petards et autres engins, tant pour l’offensive que pour la deffensive, puis les autres fortifications des fossez à plein de cuve, un pont-levis avec un ravelin enclos d’une palissade, et, pour dire en un mot, il y remarqua tant de fortifications qu’il luy sembloit imprenable ; ils le menèrent aussi en une grande sale toute tapissée de cuir d’Espagne qu’ils avoyent vollé en une navire le long de la mer12. Mais ainsi que on le conduisoit, Guillery luy mit le pistolet à la gorge, et luy fit jurer sur peine de la vie qu’il ne leur seroit jamais contraire. Après cela, on luy presente le disner, où il fut traité fort magnifiquement, et tout en vesselle d’argent, et puis après s’estre bien promenez et bien discouru ensemble, on luy reboucha la veüe, et le ramena-on jusques au bort du bois, d’où on le renvoya.

Mais quoy ? de s’ennuyer de leurs meschancetez et


11. C’étoit celle du bois des Essarts.

12. Dans l’Histoire de la vie et grandes voleries, etc., il est parlé de ce luxe de Guilleri et de ce « cuir d’Espagne volé sur mer, près des Sables-d’Olonne, à la prise d’un vaisseau enlevé par ses gens, qui exerçoient aussi la piraterie, et avoient alliance avec les forbans de plusieurs pays. » Fillon, p. 13.