Page:Variétés Tome II.djvu/122

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licentieux du carnaval. Son père, qu’on appeloit Eustache Dubois, et sa mère, nommée Jacqueline Rognon, ne purent contenir leur joye à la naissance de cet enfant de jubilation. Les songes qu’avoit faits sa mère, et qui avoient servi d’avant-coureurs à cette naissance illustre, les avoient avertis de la haute reputation à laquelle parviendroit leur fille Margot. Sa mère, Jacqueline Rognon, avoit, entr’autres songes, rêvé, quelques jours avant de mettre au monde cette singulière creature, qu’elle accouchoit d’un tambour, et que le bruit eclatant qu’il faisoit frappoit les oreilles de toute la ville. Ce rêve, joint à d’autres de mesme estoffe, engagea son père Eustache à faire tirer son horoscope. À la minute mesme que Margot vit la lumière, le plus fameux sorcier d’Amboise fut mandé. Après avoir fait passer toutes les etoiles par les quatre règles de l’arithmetique, et avoir malicieusement envisagé la gentille Margot, il resta comme en extase, et dit avec un ton de ravissement que cette fille feroit le plaisir du plus grand royaume de l’Europe, et qu’elle passeroit par les mains et par la langue de tout le monde. Comme les oracles


fréquents voyages qu’il faisoit en Touraine pour y reprendre sa joyeuse vie de chanoine de Saint-Martin de Tours, ou pour aider madame d’Aiguillon, la châtelaine de Verret, dans la composition du fameux recueil le Cosmopolite. (V. notre article sur l’abbé dans le Supplément au Dictionnaire de la conversation, 20e livraison, p. 258.) Peut-être est-ce l’abbé qui fit l’éducation de Margot. Je le croirois, d’après les détails qui se trouvent ici sur sa famille et sur son enfance. Il étoit, du reste, plus que personne, en état de le faire, et l’écolière, on va le voir, ne fut pas indigne de lui.