Page:Variétés Tome II.djvu/330

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que fourbes et deguisemens, que visages empruntés et que masques colorés ? Les plus adroits portent le masque de la devotion et de la complaisance, les autres de la pieté, de la vertu, de la religion ; quelques uns portent une conscience masquée de zèle pour le service de leur prince, et ce n’est que pour couvrir leur ambition, leur avarice et leurs interests ; les autres ont des paroles et des entretiens masqués de douceur, de civilité, de complimens, et ce n’est que pour surprendre les simples, afin de les jetter dans la medisance, de connoistre leurs pensées, leurs sentimens, leurs affections, et par ainsi juger quel party ils tiennent et de quel costé ils panchent. Les autres se couvrent et se masquent de la peau de lion, afin d’avoir de l’employ, et faire croire à ceux qui les voyent ou qui les entendent parler que l’on doit attendre de leur merite et de leur courage toutes les satisfactions imaginables, et qu’ils ne se destinent à la mort que pour le service du public. Enfin on ne vit jamais plus de comedies que l’on en voit à present, puis que les esprits les mieux sensez protestent hautement que tous nos desseins, nos entreprises, nos assemblées, ne sont qu’une veritable comedie, où les uns joüent le personnage de roy, les autres de prince, les autres de valets et les autres de fols. Mais certes, bien que cette comedie soit agreable aux uns, elle est pourtant ennuyeuse aux autres, parce qu’elle dure trop long-temps, et que l’on y laisse brusler la chandelle par les deux bouts, et que l’on fait payer double, bien que l’on ne soit placé qu’au parterre. Et ce qui est le plus à craindre, c’est que cette comedie ne se