Page:Variétés Tome II.djvu/361

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doux de ses maux. Il faut (disoit-elle en soy-mesme) que je meure ou que je sache plus amplement le sujet d’une telle disgrace. Philemon me fuit à ceste heure ; mais la fidelité de Cloris ne me manquera pas pour me le faire rencontrer ; il me la faut voir, et la supplier de m’estre à ce coup favorable. Alors, essuyant ses yeux, elle s’en alla chez Cloris, où d’abord elle veit Philemon collé sur la bouche de ceste nouvelle maistresse. Ô dieux ! (dit-elle en mesme temps) que vois-je maintenant ! et que peut-on desormais esperer des personnes, puisque Cloris est traistre ? Ah ! Philemon, que j’ay beaucoup plus de sujet de vous accuser que vous de vous plaindre de moy ! Mais non, j’ay tort ! Quy pourroit resister aux affetteries d’une meschante ? Les hommes prennent ce quy leur est offert ! Cloris vous a seduit : elle est cause de mon malheur ; et sa malice plustost que ma faute me prive de ce que mon merite et mon amour m’avoient acquis. Philemon, je ne vous envie pas ce contentement ; mais croyez qu’elle m’en paiera l’usure, et vous souvenez que je feray voir à toute la France qu’il est dangereux d’irriter une femme par la perte de ce qu’elle ayme ! Ce disant, elle sortit, s’en alla en sa chambre, où, après s’estre longuement promenée avec une demarche inegalle, elle prist du papier, sur lequel elle mist ces paroles :