Page:Variétés Tome II.djvu/362

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Cartel d’Isabelle à Cloris.

Je pervertis l’ordre du temps, et, contre la coustume des filles, vous envoie dire que je suis sur le pré avec une espée à la main pour debattre avec vous la possession de Philemon1. Si vous l’aymez, vous vous l’acquererez par ma mort ou je le possederay par la vostre.

Ce billet estant fait, elle prit un laquais en la fidelité duquel elle se vouloit asseurer, luy fit porter deux espées hors la ville, et, luy donnant le papier, luy commanda de le mettre entre les mains de Cloris, qui partit au moment qu’elle le receut avec autant de courage et d’amour qu’on peut dire, alla rechercher Isabelle, mit l’espée à la main et commença à se battre avec elle d’une telle façon qu’après luy


1. Ces duels entre femmes ne furent pas rares alors. Les prouesses de l’amazone Mme de Blamont, et de cette autre dont on raconta les hauts faits dans l’Héroïne, inspiroient ces dames et les rendoient belliqueuses. On sait par Tallemant l’histoire de la Beaupré et de son combat : « Sur le théâtre, elle et une jeune comédienne se dirent leurs vérités. ‹ Eh bien ! dit la Beaupré, je vois bien, Mademoiselle, que vous voulez me voir l’épée à la main. › Et, en disant cela, c’étoit à la farce, elle va querir deux épées point épointées. La fille en prit une, croyant badiner. La Beaupré, en colère, la blessa au cou, et l’eût tuée si l’on n’y eût couru. » (Historiettes, édit. in-12, t. 10, p. 49.) Les duels de Mlle Maupin, non pas avec des femmes (elle les aimoit trop pour