Page:Variétés Tome III.djvu/106

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quatre ou cinq mois, ils ont un petit Populo, car ils ont commencé de bonne heure à faire cet enfant ; l’argent est-il mangé, il faut commencer à vendre la chaisne des ciseaux6, et après les chaisnes du demy ceing7 ; tout est-il frippé, il faut vendre le corps, il n’y a plus que le fagot qui demeure par après ; tout cela est-il fricassé, s’il y a quatre ou cinq bagues d’or, il les fault aller vendre chez l’orphèvre l’une après l’autre, et après il en ira acheter à dix-huit deniers ou à deux carolus la pièce soubs les charniers Sainct-lnnocent ; cela fait, faut vendre la meilleure des cottes ; tout est-il mangé, on ne dit plus : ma fille, ny mon petit cœur, ny m’amour, ny ma mignonne ; Martin-Baston est employé et marche plus souvent que tous les jours. Et puis les maudissons vont leur train l’un à l’autre tous les jours à la maison : Et va, carongne ! — Tu en as menty, fils de putain ! tu as tout mangé mon bien ! — Vous avez menty, vesse ! vous avez tousjours dormy jusques à dix ou unze heures ; mais, par la serpe-bleu, je vous romperay le col, double chienne. Et le mary s’en va à la guerre, et ma pauvre diablesse reduite à la porte


6. Toute servante un peu huppée s’attachoit ses ciseaux sur le côté avec une chaînette d’argent. De plus pauvres, comme Marinette, se contentoient de la chaîne de laiton que leur donnoit Gros-Réné.

7. V., sur cette parure des servantes, notre tome 1er, p. 317–318. « C’étoit, dit Cotgrave, une sorte de ceinture dont tout le devant étoit d’or ou d’argent et dont l’autre partie étoit de soie. » On l’enjolivoit encore, comme on le voit ici, de chaînes et de brimborions. C’étoient les premières choses rendues dans les temps de détresse.