Page:Variétés Tome III.djvu/312

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prix du mouton, veu que chacun sçait qu’il y a grande disproportion du moindre au meilleur ? À vostre compte, le plus gras mouton ne vaudroit que seize sols davantage que le plus chetif3, veu qu’il y a mouton de neuf livres et autres de trois livres. Pour le veau, pareille raison. Ma cousine la Moignotte, que Dieu veulle conserver et luy restablir la santé ! estant fermière de la grande ferme de Paré, elle avoit douze vaches, dont l’une avoit nom la Bourelière, laquelle faisoit des veaux aussi puissants que des bœufs du Poitou. Je vous laisse à penser quelle perte elle eust receu de les vendre à six livres, et le grand profit de vendre des avortons à pareil prix de six livres. Ces considerations, et autres que je veux deduire cy-après, font que je ne puis approuver ce reglement. Et d’autant qu’estant bourgeois de Paris, je faicts partie d’icelle, il me semble qu’au peril de la famine qui nous menace, je doibs dire mon opinion, pour estre receue ainsi qu’on le verra bon estre. Que si quelqu’un me debat mon droict de bourgeoisie, Pierre de la Porte et Guillemette des Rosières, surnommée Dix-sept-demi-septiers, mes père et mère, vous leveront ceste difficulté et vous diront qu’ils ont porté les crochets et la hoste vingt ans, servants à porter viandes et fruicts des halles. Je vous laisse à penser si j’ay quelque memoire du vineux mestier qui fait dire la verité. Ma qualité prouvée, venons au subject qui se presente. Toute


3. En 1600, le prix d’un beau mouton étoit de 4 livres. (Dupré de Saint-Maur, Essai sur les monnoies, année 1600.)