Page:Variétés Tome V.djvu/251

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Vous pourriez à souhait tailler, rogner et prendre,
Et même, disposant de la clef du caveau7,
Aller de tems en tems visiter le tonneau.
Comme telle aventure est rare et peu commune,
Quand elle vous viendra, poussez vostre fortune,
Sçachez trouver du bon sur le poivre et le clou,
Gagnez sur un balai, sur du lait, sur un chou8.
Pour peu qu’on ait d’adresse, on met chaque jour maigre
Tant pour oignon, persil, pour verjus et vinaigre,
Et souvent ce qu’on n’a deboursé qu’une fois,
On peut, quand on l’entend, le faire ecrire trois.
Comme ce point pourroit vous sembler difficile,
Une comparaison vous le rendra facile.
Vous sçavez, comme moi, que dans plusieurs maisons
On se fait un plaisir, en certaines saisons,
D’avoir, surtout le soir, la salade sur table.
Au goût de bien des gens c’est un mets delectable,



Savez-vous bien pourquoi ? — Non, pourquoi donc ? — C’est pource
Qu’à tirer le teston son portier est ardent.
——--Mettez les doigts dans votre bourse,

Et vous rencontrerez monsieur le president.

7. Avoir la clef de la cave, c’étoit toute l’ambition des servantes. Écoutez ce que dit Pierrot, déguisé en cuisinière, à l’acte 3, scène 1re, de la Précaution inutile : « Tenez, Monsieur, s’il n’y a pas un homme tout luisant d’or dans votre jardin, ôtez-moi la clef de la cave. Dame, voilà un terrible serment, stilà ! » (Théâtre italien de Gherardi, t. 1er, p. 487.)

8. Le chevalier d’Aceilly (de Cailly) savoit quel art ont les servantes de faire payer au maître ce qu’elles ont pris soin d’obtenir à bon compte :

——--Quand ma servante est au marché,
Pour avoir à bon compte elle prend de la peine ;
——--Mais que m’importe qu’elle en prenne ?
Quand elle est au logis, rien n’est à bon marché.