Page:Variétés Tome V.djvu/296

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

S’il met là son honneur, le monde y met sa honte.
La face n’y fait rien : la mer a des poissons19
Qui ont nostre visage ; en cent mille façons
Nature industrieuse a mis dedans les plantes,
Dans les eaux, dedans l’air, dans les voutes brillantes,
Le caractère humain, qui pour cela n’ont rien
Du feu de Promethée, ce larrecin ancien,
Sans lequel on est beste. Apprens, grossier profane,
Qu’on peut en courte oreille estre un bien fort grand asne,
Mesme on peut estre bœuf en visage de roy20 ;
Je n’en veux à temoing qu’en nostre antique loy
Nabucodonosor, ce grand prince d’Asie,
Moins connu pour son daiz que pour sa frainesie.
Après avoir longtemps dominé sous ses loys
Les peuples d’Assirie, ensuite de cent roys,
Ses illustres ayeux, d’un sceptre plus antique
Que la tige d’Abram au peuple judaïque,
Sans egard à sa race, ou à l’illustre sang
Qui luy donnoient les biens, la coronne et le rang,
Par jugement divin parut en face humaine,
Paissant avec les bœufs le treffle, la vervaine,
Se soulant de sainfoin, bien qu’un royal manteau
Couvrist le corps du prince en couvrant le thoreau.
Vray portraict d’Onosandre, excellante figure
Representant le corps, l’esprit et la nature
Du Grossier fort illustre en biens et en maison,



19. Var. :

Tel porte la façon d’estre un homme en effect
Et le considerant c’est un asne tout faict.

20. Ce vers et les dix-neuf qui suivent manquent dans le Cabinet satyrique.