Page:Variétés Tome VI.djvu/144

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Aussi, pour m’excuser, si l’on me veut reprendre
En ce petit discours trop rude et mal troussé,
Je dis qu’un artisan ne se peut faire entendre
Par les mots de son art sans estre un peu forcé.

Moy donc, le moindre en l’art des faiseurs d’harquebuzes,
Et le moins entendu pour parler à un roy,
Doublement importun, à la porte des Muses
J’ay mandié ces vers, qui parleront pour moy,

Ce ne sont point des vers des savantes estudes :
Onc je n’y ay passé un seul jour de mes ans ;
Ils ont esté cueillis ès rudes solitudes
Où je roule ma vie au train des païsans.

Ce ne sont point aussi d’une plume subtile
Les beaux traits ny l’emprunt d’un langage affetté ;
Ains c’est du fruict forcé de ma veine infertile
Qu’indiscret je dedie à Votre Majesté.

Et, si vous acceptez mon bien peu d’industrie,
Selon ce que j’en ose icy mettre en avant,
Sans me faire quitter tout à fait ma patrie,
Vous ne lairrez d’en voir les effets bien souvent.

J’envie tant l’honneur de vous rendre service,
Que quand je n’en aurois que l’envie tousjours,
Geste envie me semble à devider propice
Sous vostre règne heureux le reste de mes jours.

Faites-m’en donc donner (ô très puissant monarque !)
La charge et le moyen convenable au projet,
Et je seray tant mieux, jusqu’où ma fin se marque,
De Vostre Majesté le très humble sujet.