Page:Variétés Tome VI.djvu/225

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contre l’avis du bon Homme, qui etoit le plus sage de tous. Vous faites bien les delicats, dit-il ; vous ne seriez pas ici non plus que moi si nos Mères n’avoient forligné. Nous sçavons ce que nous sçavons, mais sçachez que le plus beau de notre nez ne vient que d’emprunt, et nous avons en ligne directe, aussi bien qu’en collaterale, tant de sujets de nous louer des habiles Femmes que nous avons en notre Maison, que je m’etonne que vous en vouliez bannir celles qui leur ressemblent. Quand j’ai marié mon petit-fils de Cœuvres avec mademoiselle de Lionne, croyez-vous que j’aye consideré ni qu’elle etoit fille d’un minisire d’Etat, ni son bien, ni son credit ? Ce sont des veuës trop bornées pour un homme de mon âge et de mon experience. Toute ma pensée a eté qu’etant belle comme elle etoit, elle pourroit faire revivre la grandeur de notre maison, laquelle, comme vous savez, tire toute sa consideration, non pas du côté des mâles, mais du côté des femelles25. Si je me suis trompé, ce n’est pas ma faute : mon intention a eté bonne en cela. Ainsi, puisque la marquise de Cœuvres n’est blamée que pour avoir recherché les plaisirs que la nature nous permet, je me declare son protecteur. Que tout cela cependant se passe entre nous sans que la cour en soit abreuvée. Les plus courtes follies sont les meilleures26,


25. Le maréchal d’Estrées, à qui l’on prête ces belles paroles, étoit neveu de Gabrielle, de qui venoit toute la grandeur de sa maison.

26. C’est ce que dit Ch. Beys pour clore le 5e acte de ses Illustres fous :

La plus courte folie est toujours la meilleure.