Page:Variétés Tome VII.djvu/125

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ce n’est qu’une histoire comique ! reprit Sylon ; hé ! croyez-vous, en bonne foy, que le Dom Quichot et le Berger extravagant40, les Visionnaires, la Gigantomachie41 et le Pedant joué ayent moins acquis de gloire à leurs autheurs que pourroient avoir fait les ouvrages les plus serieux de la philosophie ? Non, non (comme un des plus doctes hommes de ce siècle l’a fort bien sçeu remarquer), l’homme estant egalement bien definy par ces deux attributs de risible et de raisonnable, il n’y a pas moins de gloire ny de dificulté à le faire rire par methode qu’à exercer cette fonction de son ame qui le fait raisonner. Aussi voyons-nous que Ciceron, dans ses livres De orotore, ne s’est pas moins etendu sur le sujet de ridiculo que sur les autres parties d’un orateur qui semblent plus relevées. Si les œuvres et les apophtegmes de Mamurin42, par exemple… » On ne sçait pas bien ce que Sylon vouloit dire icy, car son amy, l’interrompant : « Que voulez-vous dire d’œuvres et d’apophtegmes de Mamurin ? luy dit-il. — Est-il possible, repartit Sylon, qu’en vous racontant


40. C’est le roman satirique décoché par Sorel contre les ridicules de l’Astrée et autres pastorales prétentieuses. L’éloge qu’on en fait ici me confirme dans l’opinion que Sorel pourroit bien être l’auteur de cette Histoire de Sibus. On n’est jamais si bien loué que par soi-même. Et qui alors auroit loué Sorel, si ce n’est Sorel ?

41. Typhon, ou la Gigantomachie, poème burlesque de Scarron.

42. Ici Mamurin est bien Montmaur. Ces apophthegmes ne se trouvent pas dans le recueil de Sallengre, Histoire de P. de Montmaur.