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Page:Variétés Tome VIII.djvu/61

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affligé de laisser des enfans sans bien et sans secours, il les fit venir pour leur donner sa benediction. Il dit à son fils : Pour toi, tu es un garçon, tu te tireras bien d’affaire. Regardant ensuite sa fille, après quelques reflexions : Vas, lui dit-il, je ne suis plus en peine de toi, tu seras un jour puissamment pourvue13.

Après la mort du sieur d’Aubigné, son epouse, avec ses deux enfans, repassa à La Martinique14, et de là à La Guadeloupe, où elle se retira chez un assez bon habitant, qui étoit de Niort, appelé Delarue ; elle y demeura près de deux ans, menant une vie fort petite. C’est de cet habitant qu’on a su ce fait. De là elle passa à l’île de Saint-Christophe pour prendre un bâtiment qui pût la transporter en France avec ses enfans. En attendant ce passage, elle mou-


Pour que Constant d’Aubigné pût adresser à ses enfants les dernières paroles qu’on lui prête ici, il falloit donc qu’ils fussent de retour près de lui ; et par conséquent aussi tout me fait croire, comme je l’ai dit, qu’il ne mourut pas avant la fin de 1646.

13. Toute petite, Françoise d’Aubigné avoit donné à son père une excellente opinion de son esprit. Enragé huguenot, il la croyoit trop spirituelle et trop raisonnable pour être de la religion que sa mère, bonne catholique au contraire, lui avoit donnée. « J’ai ouï dire à Mme de Maintenon, écrit Mme de Caylus, que, la tenant entre ses bras, il lui disoit : Est-il possible que vous, qui avez tant d’esprit, puissiez croire tout ce qu’on vous apprend dans votre catéchisme ? » (Les souvenirs de Mme de Caylus, 1805, in-12, p. 11.)

14. Ce n’est donc pas là, comme on le voit, mais sans doute à La Grenade, que d’Aubigné seroit mort.