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CHAPITRE II

Le repas m’a semblé interminable tant j’avais hâte de mettre mon projet à exécution. Boby était en face de moi, de l’autre côté de la table chargée de verreries, de fruits et de fleurs. Il mangeait consciencieusement, avec un bel appétit de jeune garçon sportif.

Il me fait un drôle d’effet, avec sa taille impressionnante, ses dents de fauve, son teint frais et ses cheveux clairs dont une mèche folle retombe sur son visage.

J’ai envie de l’attaquer, de le prendre à parti, pas seulement avec des mots aigres-doux. J’ai envie de le taquiner, de lui faire un peu mal.

Par moments, à travers la table, il me semble que je le touche, que je le palpe. Pourquoi est-ce mal vu ?… On devrait avoir le droit de toucher les gens qui vous plaisent.

Les Écossais forcent, paraît-il, leurs invités à coucher avec leurs femmes et leurs filles ! Ah ! on n’est vraiment pas écossais par ici !

Moi, à ce dîner, devant mon père l’ex-don Juan, et ma mère l’écrivain d’amour, je touche minutieusement les lobes des oreilles de Boby, je pince ces joues de garçon bien portant, je pince avec des trucs, en tournant pour avoir plus de prise.

Et que ne fais-je pas, au reste, à son cou de fille, à son dos bien verni préparé pour les ongles, à ce creux de la taille