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Filippo présenta ensemble le modèle de l’église et celui de l’habitation des religieux, qui a été mis à exécution tel que nous le voyons aujourd’hui. L’église a cent soixante et une brasses de longueur, et cinquante-quatre de largeur. Ses colonnes et ses autres ornements sont d’une grâce et d’une richesse inimaginables. Ce serait le temple le plus parfait de la chrétienté, s’il n’eut été frappé par la main maudite des ignorants, qui parviennent presque toujours à gâter les plus belles choses. Bien que l’on n’ait pas exactement observé le modèle de Brunelleschi, ce temple n’est pas moins le mieux distribué que je connaisse. Il renferme quelques défauts que l’on attribue à notre artiste. Je les passerai sous silence ; car il est présumable qu’il les aurait évités, s’il eût présidé lui-même à l’achèvement de cet édifice qui, malgré cela, témoigne puissamment de l’immensité de son génie  (14).

Filippo était d’un caractère vif et enjoué. Il lui échappait souvent des mots fort spirituels. Lorenzo Ghiberti avait acheté à Monte-Morello le domaine de Lepriano, qu’il ne tarda pas à vendre, s’étant aperçu que les frais d’entretien surpassaient de plus du double les revenus de cette propriété. Quelque temps après, on demanda à Filippo en quoi Lorenzo avait donné la meilleure preuve de génie : « En vendant Lepriano, » répondit notre artiste.

Le 16 avril 1446, Brunelleschi rendit son âme à Dieu. Il mérita, par ses rudes travaux, un nom honoré sur cette terre, et une place glorieuse dans le ciel.