Page:Vasari - Vies des peintres - t3 t4, 1841.djvu/256

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voir jusque dans ses églises les images des citoyens qui l’avaient illustrée. Il est peu de maîtres d’ailleurs qui aient surpassé l’énergique vérité d’expression que Ghirlandaio imprima aux représentations de la physionomie humaine, et nous sommes loin d’entendre par là ce mérite banal de ressemblance qui consiste dans la précision des détails du visage, et que les plus détestables peintres sont parfois en droit de revendiquer ; nous voulons dire que l’extérieur de l’homme devenait, sous son pinceau, le fidèle miroir de l’intérieur ; en autres termes, des mœurs, des affections, des passions de l’individu. Et, pour obtenir ce résultat, il ne faut pas seulement du talent, il faut du génie.

Avant d’arriver à la fin de cette note, n’oublions pas de signaler une importante acquisition que l’art doit au Ghirlandaio, et dont Vasari, il nous semble, ne lui fait pas assez clairement honneur. Nous parlons de la perspective aérienne. Domenico en offrit le premier exemple dans un tableau de la galerie du grand duc, dont le dernier plan représente une vue étendue des lagunes de Venise ; et il la poussa à la plus haute perfection dans une Adoration des Mages que possède la chapelle d’un hospice de la place de la Nunziata, à Florence. En vulgarisant la perspective aérienne, le Ghirlandaio ne fut pas moins utile que les Paolo Uccello et les Pietro della Francesca, qui, l’on s’en souvient, furent les intrépides promoteurs de la perspective linéaire. Grâce au Ghirlandaio, pour marcher à pleines voiles vers un suprême épanouissement, il ne manqua donc plus rien à l’art de la