Page:Vasari - Vies des peintres - t5 t6, 1841.djvu/581

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rête en présence de la peinture de ce maître, moins il se sent tourmenté du desir de connaître par quels artifices ont été cherchés et produits un effet aussi puissant, une expression de la forme aussi élégante et aussi intime. Le peintre, sentant toujours l’impression première de ce noble ensemble, sans faiblir ou sans se transformer, se maintenir en lui, ne se prend jamais à isoler les morceaux capitaux, à circonscrire les endroits faibles, ou à remarquer les transitions savantes ; son œil demeure irrésistiblement autant que volontairement au centre de ce faisceau si bien lié de beauté, grande et une. D’autant plus intense qu’elle est plus générale, d’autant moins localisable qu’elle est plus consciencieuse, nous pouvons donc dire seulement que notre admiration pour l’œuvre d’Andrea a sa cause essentielle dans l’homogénéité et l’unité de son talent. Quant au type de beauté, considéré en soi, qu’Andrea s’est complu à reproduire, il a on ne sait quoi d’inattendu et de pénétrant qui distingue éminemment ses créations des œuvres de son époque. Toujours sobre et simple, la grâce de ses figures est parfois sauvage, jamais maniérée ; leur disposition, parfois abrupte, jamais grossière. Son exécution est naïve comme ses intentions, mais cette naïveté ne va jamais s’appauvrir dans la poursuite des détails, ou se perdre dans leur suppression. Génie enfin plein de bonhomie et de calcul, plein de souplesse à la fois et d’audace, de retenue et d’entraînement ; en un mot, tout décèle en lui l’admirateur, le reproducteur aussi tranquille que hardi de la nature.