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UNE VENGEANCE

pâle, et il me sembla qu’un visage fluide, spectral se détachait derrière le mien, comme un reflet.

L’idée de m’éloigner de Paris me vint immédiatement, et le nom d’un ami que je n’avais pas vu depuis des années expira sur mes lèvres : Georges d’Ambroise, murmurai-je, mais, où le trouver ?… Puis, une sorte d’angoisse m’étreignit à la gorge, il me sembla, en jetant un nouveau coup d’œil dans la glace, que la silhouette pâle que j’avais remarquée déjà se détachait clairement à côté de ma propre image, et que ce fantôme avait les traits de Georges !

. . . . . . . . . . . . . . . . .

Le lendemain matin, mon valet de chambre m’apporta une dépêche, et ce fut presque sans surprise que j’appris que mon ami était à l’article de la mort. Je partis immédiatement pour recevoir le dernier adieu de celui qui avait été mon compagnon d’enfance le plus cher et le plus fidèle.

Le château qu’il habitait avait, d’un côté, vue sur un immense étang bordé d’arbres séculaires, et de l’autre sur le plus admirable paysage que l’on pût imaginer : c’était un grand bâtiment fort ancien, d’un aspect monacal et sombre. Tout un rideau de plantes grimpantes enchevêtrées recouvrait une partie des murs et voilait les fenêtres ogivales qui semblaient s’ouvrir déjà, comme à regret, à la vie et au soleil.