Page:Vaudere - L anarchiste.pdf/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
215
UNE VENGEANCE

Ce contact me fit mal ; mais je maintins résolument et opiniâtrement mon attention clouée à l’image de la jeune femme.

Quelques minutes s’écoulèrent sans aucun incident. A la longue, il devint évident que le sein s’était gonflé et qu’un imperceptible tremblement agitait les lèvres.

Sous la pression d’une horreur et d’une terreur inexprimables pour lesquelles le langage de l’humanité n’a pas d’expressions suffisamment énergiques, je sentis les pulsations de ma poitrine s’arrêter et mes membres se raidir sur place. Par un effort surhumain, je parvins cependant à me lever, et, prenant un cierge, je le tendis devant le visage de Bérénice, afin de dissiper toute illusion ; mais les symptômes qui m’avaient frappé ne se renouvelèrent pas.

Je retombai en frissonnant sur le fauteuil que j’occupais près de Georges, et je m’abandonnai à toutes les terreurs d’une âme troublée. Cette fois, mon imagination éperdue avait réellement cru voir et entendre, et je me pris à trembler sur moi. même comme si j’avais senti les griffes de la folie entrer dans ma chair. Au dehors, le vent soufflait en tempête, la flamme des cierges oscillait et prenait des teintes bleues ou vertes plus visibles par l’agonie du feu que je n’osais alimenter dans l’âtre. Chaque objet était devenu mobile comme