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UNE VENGEANCE

la lueur incertaine qui l’animait. Les portes se balançaient, les tentures tressaillaient, de longues ombres mouvantes passaient sur le plafond, et mon ami, sur sa couche mortuaire, semblait se tordre comme un damné en proie aux tourments de l’enfer.

Je sentais que j’étais prêt de me trouver mal, et je n’étais préservé de l’évanouissement que par la terreur même.

Tout à coup, je crus percevoir un frôlement à mes côtés, et je tournai la tète, le cou raidi, retenant mon haleine, la main crispée à la main glacée du cadavre. J’aspirai le silence, doutant encore, dans une indicible agonie d’angoisse ; mais rien d’anormal ne se produisit. Une heure s’écoula ainsi, et je retombais peu à peu dans mes vagues rêveries, quand j’eus de nouveau la perception d’un bruit léger qui partait du fond de la pièce. J’écoutai au comble de l’horreur, le son se fit entendre de nouveau : on eût dit un soupir. Je me précipitai vers la statue, et je vis les lèvres se relâcher, découvrant une ligne brillante de dents nacrées. La stupéfaction lutta alors dans mon esprit avec l’indicible terreur qui l’avait do miné jusque-là. Je sentis que ma vue s’obscurcissait, que ma raison s’enfuyait, et je poussai un cri aigu. Pourtant, j’essayai encore de me persuader que j’avais été le jouet d’une hallucina-