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BARCELONE

Le tour des maisons religieuses de la province ne devait pas tarder. On entendait de proche en proche le pas des argousins et le coup de marteau des spoliateurs. Tantôt l’âme du Frère s’abandonnait à de poignantes angoisses qui, toutes, se résumaient en deux points d’interrogation : Que va devenir la Société des Missionnaires du Sacré-Cœur ? Que fera-t-on de la Petite-Œuvre ? Tantôt l’espoir l’emportait et aussi le courage. Au fond, c’était toujours l’abandon à la providence du Cœur de Jésus. « L’Église, écrit-il à son « parrain », traverse une grande crise, et notre chère petite Société se ressent de la tempête. Ses souffrances me vont au cœur comme celles de ma mère bien-aimée. Ses dangers, comme ceux que court notre chère Petite-Œuvre, m’attristent profondément[1] . »

Sur ces entrefaites, l’organiste de la basilique d’Issoudun, le P. Alphonse Postal, tombe malade. On appelle le frère Verjus pour le remplacer pendant les grandes vacances scolaires. Il arrive à temps pour le veiller une fois ou deux : « J’ai veillé un peu notre cher malade. On a le tort de ne lui dire que des choses badines. Ce n’est pas le moment d’égayer et de distraire une âme, le moment de la mort[2] ! » Le bon Père meurt le 15 août, et le Frère écrit : « Il ne pouvait pas mieux choisir... Il est mort le même jour que saint Stanislas Kostka ; c’est une faveur que j’estime bien grande[3] ... » — « Mon Dieu, recevez-le dans votre Paradis ! Comme il est heureux ! Il aime purement le Sacré Cœur. Il voit, il sait tout... Quand donc mon tour viendra-t-il ? Le martyre, mon Dieu, le martyre ! Celui de mon cœur commence ; merci, ô Jésus[4] . »

Organiste et chef de chœur aux jours de pèlerinage, le Frère se donne tout entier, comme toujours. Le 18 août, il écrit : « Je cède mon lit à un pauvre malade oublié. Quel bonheur de faire un heureux ! Je ne sais comment la Pro-

  1. Lettre à M. C..., juillet.
  2. Journal du 13 août.
  3. Lettre à M. C..., septembre.
  4. 16 août.