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À TRAVERS LES OCÉANS

la colonie, ils doivent tenter d’autres moyens, chercher d’autres routes. Justement, on vient d’apprendre qu’un navire, le Panay, est en partance pour Singapour. Sans doute, il faudra refaire cinq cent cinquante lieues. Mais de là, par les Célèbes et la Malaisie, on pourra, s’il plaît à Dieu, atteindre la Nouvelle-Guinée. C’est un détour de mille cinq cents lieues qu’il faut ajouter aux trois mille cinq cents déjà parcourues ; mais qu’est-ce que cela, quand il s’agit d’obéir à l’Église et de donner un monde à Jésus-Christ ? Ils vont retenir leur place à bord du Panay.

Hélas ! Ils ont compté sans une loi qui oblige tout étranger dont le passage à Manille a duré plus de vingt et un jours, à annoncer son départ dans les feuilles publiques au moins trois jours à l’avance. Ils ignoraient cette loi. Ils n’ont plus le temps. Les billets sont pris. Que faire ? Le P. Durin va solliciter l’appui du consul de France.

Pendant ce temps-là, le P. Navarre et le P. Cramaille retournèrent à bord de la Nouvelle-Bretagne. Ils y furent témoins d’une scène écœurante. Le commandant, auquel le marquis de Rays avait refusé, comme nous l’avons dit, de payer le surcroit des marchandises achetées et chargées, était rentré de la ville, exaspéré. Il réunit tout l’équipage, les passagers, les Missionnaires ; puis il fait contre le marquis une sortie virulente où il mêle des propos malsonnants contre la religion. Les officiers applaudissent. Alors, il prend le portrait de M. de Rays, appendu au salon du bateau, et le piétine. Les officiers en font autant. Ces actes de violence, ce discours haineux apprirent aux Missionnaires à quelle sorte de gens ils eussent eu à faire, s’ils fussent allés dans la colonie. Les pauvres passagers, assez bons catholiques pour la plupart, étaient désolés de se voir aux mains des francs-maçons, — le commandant et plusieurs officiers appartenaient, en effet, à la secte. — Les Missionnaires donnèrent des marques non équivoques de leur désapprobation, puis se retirèrent dans leurs cabines. Ils ne devaient quitter la Nouvelle-Bretagne que le lendemain. Le P. Durin arriva plus tard, avec l’autorisa-