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ROME

j’ai monté ces escaliers qu’ont foulés tant de Missionnaires ! Si j’avais été seul, je les aurais montés à genoux[1]. » Quelques mois plus tard, il retournera dans cette sainte maison, où toutes les langues apprennent à prêcher le nom de Jésus-Christ, et il dira : « J’en voudrais baiser toutes les pierres[2]. » Une autre fois encore et plus longuement, il visitera l’illustre collège : « Je me suis senti pris d’une singulière émotion en entrant dans cette chapelle où notre bon Jésus forme ses Missionnaires, et où il a peut-être bien des fois accordé la grâce du martyre. Je lui ai demandé la grande grâce… Nous avons visité la bibliothèque, véritable trésor. Tout autour, les portraits des évêques qui ont puisé à cette source sainte la science du Seigneur… Que dire du musée ? J’étais ravi, et tellement heureux ! J’étais aussi un peu jaloux, mais plein d’espérance. Quand notre petite « chambre des Missions » sera-t-elle un musée, ou plutôt quand sera-t-elle la salle des Martyrs ? »

Au moment de son arrivée, la communauté prenait ses vacances loin du brûlant et fiévreux climat de Rome, dans les monts Albains, à Albano même. Les deux arrivants vont l’y rejoindre. « Nous revenions de promenade, nous écrit un scolastique de ce temps-là, par un beau soir. Nous chantions de bon cœur, quand tout à coup, sortant de derrière un arbre où ils s’étaient dissimulés, surgissent devant nous le P. Jouet, le frère Verjus et le frère Neenan. Quelle surprise ! Quelles embrassades ! Quelles poignées de main ! L’accoutrement du frère Verjus nous fit bien rire : la soutane était délabrée, des souliers sans semelle ; pour chapeau, l’immense sombrero espagnol aux larges bords relevés et d’une couleur inénarrable. On aurait dit que le cher Frère arrivait d’une excursion aux pays sauvages : il venait tout simplement de Barcelone, où l’on connaissait, paraît-il, à cette époque, les austères beautés de la pauvreté. »

Ce fut un enchantement que cette villégiature : le lac d’Albano, dans le plus beau cratère qui soit peut-être au

  1. 20 septembre.
  2. 17 février 1882.